
Microsoft visé par une action collective britannique pour pratiques anticoncurrentielles
Les nuages s'amoncellent au-dessus de Microsoft au Royaume-Uni. Maria Luisa Stasi, avocate spécialisée en droit de la concurrence, vient de lancer une action collective contre le géant de l'informatique devant le Competition Appeal Tribunal britannique. En cause : des pratiques tarifaires jugées abusives et anticoncurrentielles sur les licences de son système d'exploitation pour serveurs, Windows Server.
Selon la plainte, Microsoft aurait imposé des tarifs excessifs à ses clients présents sur d'autres plateformes cloud que son propre service Azure. Une façon de les contraindre à migrer vers sa solution maison. Des pratiques qui pourraient valoir à la firme de Redmond une condamnation salée : plus de 1,2 milliard d'euros de dommages et intérêts sont réclamés dans le cadre de cette procédure.
Une majoration de 400% pour les clients des clouds concurrents ?
Dans un communiqué, Maria Luisa Stasi, également responsable juridique du groupe de défense des droits numériques Article19, dénonce une volonté délibérée d'évincer la concurrence:
Microsoft punit les entreprises et organisations britanniques qui utilisent Google, Amazon et Alibaba pour le cloud computing en les obligeant à payer plus cher pour Windows Server. Ce faisant, Microsoft tente de forcer les clients à utiliser son service de cloud Azure et de restreindre la concurrence dans le secteur.
– Maria Luisa Stasi, avocate
Des accusations qui font écho à celles portées par Google à la rentrée 2022 auprès de la Commission européenne. Amit Zavery, vice-président de Google Cloud, affirmait alors que depuis l'adoption de nouvelles conditions de licences en 2019, Microsoft appliquait une majoration de 400% pour les entreprises souhaitant se procurer Windows Server sur Amazon Web Services ou Google Cloud.
Une situation d'autant plus préoccupante compte tenu de la position dominante de Microsoft sur le marché des OS serveurs. La société détiendrait en effet 70% de parts de marché dans ce secteur selon Google.
Toutes les entreprises britanniques concernées automatiquement intégrées
À noter que l'action collective lancée au Royaume-Uni est une procédure avec "opt-out". Cela signifie que toutes les entreprises britanniques concernées sont automatiquement comptabilisées et peuvent être indemnisées le cas échéant, sauf si elles décident de se retirer volontairement.
Microsoft n'a pas souhaité commenter cette nouvelle procédure à ce stade. Mais la firme avait réussi à éteindre un premier front en Europe en 2022. Suite à une plainte de l'association professionnelle des fournisseurs de cloud européens CISPE, Microsoft aurait en effet déboursé 20 millions d'euros pour éviter l'ouverture d'une enquête formelle de la Commission européenne.
Quelques jours plus tard, OVHCloud, qui avait également porté plainte, retirait ses poursuites après plusieurs engagements de Microsoft. Mais le répit pourrait n'être que de courte durée pour le groupe américain.
Le régulateur britannique bientôt dans la danse
L'autorité de la concurrence britannique (CMA) a en effet annoncé la semaine dernière son intention d'imposer prochainement des mesures "comportementales" pour lutter contre les pratiques anticoncurrentielles dans le cloud.
Cette nouvelle réglementation pourrait notamment obliger Microsoft à appliquer les mêmes tarifs pour ses logiciels quel que soit le fournisseur cloud, et faire tomber plusieurs barrières techniques au changement de prestataire.
Ironie du sort, Google pourrait être exempté de ces futures règles anticoncurrentielles selon une source de CNBC, du fait de sa plus faible part de marché. Un élément qui ne devrait pas peser en faveur de Microsoft dans la bataille juridique qui s'annonce outre-Manche.