
Lucid Motors : Peter Rawlinson Quitte Son Poste de PDG
Imaginez un instant : après douze ans à la tête d’une entreprise qui rêve de révolutionner la mobilité, un homme décide de passer le relais alors que son dernier projet vient tout juste de voir le jour. C’est l’histoire de Peter Rawlinson, qui a récemment quitté son poste de PDG de Lucid Motors, une start-up ambitieuse dans le domaine des véhicules électriques. Une question flotte dans l’air : pourquoi maintenant, et que réserve l’avenir à cette entreprise qui mise tout sur son nouveau SUV, le Gravity ? Plongeons dans cette transition inattendue et ses implications.
Un Changement de Cap chez Lucid Motors
Le 25 février 2025, Lucid Motors a surpris le monde de l’automobile en annonçant le départ de Peter Rawlinson, son PDG et directeur technique depuis près de six ans. Cette décision intervient alors que l’entreprise vient de lancer son très attendu Gravity SUV, un modèle censé redresser la barre après des années de défis. Marc Winterhoff, jusque-là directeur des opérations, prend les rênes en tant que PDG par intérim, tandis que Rawlinson se mue en conseiller technique stratégique.
Une figure emblématique s’efface
Peter Rawlinson n’est pas un inconnu dans l’univers des voitures électriques. Avant de rejoindre Lucid en 2013, alors que l’entreprise s’appelait encore Atieva, il avait marqué les esprits chez Tesla en tant qu’ingénieur en chef du Model S. Chez Lucid, il a transformé une petite structure en un acteur reconnu, notamment grâce au lancement de la berline Air et, plus récemment, du Gravity SUV. Mais pourquoi partir maintenant ?
« Maintenant que nous avons lancé le Gravity avec succès, il est temps pour moi de passer à autre chose après ces douze années. »
– Peter Rawlinson
Selon lui, le moment est idéal : le Gravity est sur les rails, et l’entreprise semble prête à voler de ses propres ailes. Pourtant, certains analystes s’interrogent sur ce timing, alors que Lucid traverse encore des turbulences financières.
Un bilan contrasté pour Lucid
Lucid Motors a connu des hauts et des bas sous la direction de Rawlinson. En 2024, l’entreprise a livré 10 241 véhicules, une nette progression par rapport aux 6 001 de 2023. Cela a généré 808 millions de dollars de revenus, contre 595 millions l’année précédente. Mais derrière ces chiffres encourageants se cache une réalité plus sombre : une perte colossale de **2,7 milliards de dollars** en 2024, à peine inférieure à celle de 2023.
Le lancement de la berline Air n’a pas atteint les objectifs ambitieux fixés lors de l’entrée en bourse en 2021. Le Gravity SUV, avec sa production qui débute timidement, est vu comme un pari risqué mais essentiel. Lucid prévoit de doubler sa production en 2025, visant 20 000 unités. Réussira-t-elle à tenir cette promesse ?
Une transition sous haute tension
Le passage de Rawlinson à un rôle de conseiller ne convainc pas tout le monde. Lors d’une conférence avec les investisseurs, Marc Winterhoff a insisté sur le fait que l’ancien PDG ne sera plus impliqué au quotidien. Cette absence a surpris, notamment l’analyste John Murphy, qui a trouvé curieux que Rawlinson ne soit pas présent pour expliquer lui-même sa décision.
Lucid dépend encore lourdement du fonds souverain saoudien, son principal actionnaire, qui a injecté des milliards en 2024 pour maintenir l’entreprise à flot. Rawlinson avait pourtant qualifié cette dépendance de « dangereuse » dans une interview au *Financial Times*. Ironie du sort, il devient désormais conseiller auprès du président du conseil, un haut dirigeant de ce même fonds.
Gravity SUV : l’espoir d’un renouveau
Le Gravity SUV est au cœur des espoirs de Lucid. Ce modèle, lancé fin 2024, cible un marché en pleine expansion : celui des SUV électriques. Avec un design audacieux et des technologies avancées, il pourrait séduire une clientèle plus large que la berline Air. Mais la montée en cadence reste lente, réservée pour l’instant aux premiers clients et aux insiders.
Pour 2025, Lucid mise sur une production ambitieuse. Si elle parvient à tenir ses objectifs, cela pourrait marquer un tournant. Sinon, la pression sur Marc Winterhoff risque de s’intensifier rapidement.
Marc Winterhoff : l’homme de la situation ?
Peu connu du grand public, Marc Winterhoff hérite d’un défi de taille. En tant que directeur des opérations depuis plusieurs années, il connaît les rouages de Lucid. Mais passer d’un rôle opérationnel à celui de PDG par intérim demande une vision stratégique qu’il devra prouver rapidement.
Son discours lors de la conférence investisseurs a voulu rassurer : le départ de Rawlinson est une transition naturelle après douze ans d’efforts. Mais sans successeur permanent annoncé, certains y voient un signe d’instabilité.
Les défis financiers en toile de fond
Avec seulement **1,6 milliard de dollars** en caisse fin 2024, Lucid doit jongler entre investissements massifs et rentabilité. Le soutien financier de l’Arabie saoudite a été crucial, mais il ne peut durer éternellement. La start-up doit prouver qu’elle peut générer des profits, un défi qui a fait trébucher nombre de ses concurrentes.
Pour y parvenir, l’entreprise compte sur une optimisation de sa chaîne de production et une montée en gamme de ses véhicules. Le Gravity pourrait être la clé, à condition que la demande suive.
Que retenir de l’ère Rawlinson ?
Peter Rawlinson laisse derrière lui un héritage complexe. D’un côté, il a fait de Lucid une référence technologique dans les véhicules électriques. De l’autre, les pertes abyssales et les objectifs manqués ternissent son bilan. Voici un résumé de son passage :
- Transformation d’Atieva en Lucid Motors, un acteur majeur.
- Lancement de la berline Air et du Gravity SUV.
- Pertes cumulées dépassant les 5 milliards sur deux ans.
Son départ marque la fin d’une ère, mais aussi le début d’une nouvelle phase incertaine pour Lucid.
L’avenir de la mobilité électrique en jeu
Lucid Motors n’est pas seule sur ce marché ultra-concurrentiel. Tesla, Rivian et d’autres rivalisent pour dominer le secteur des véhicules électriques. Le départ de Rawlinson pourrait fragiliser Lucid à un moment où chaque décision compte. Ou, au contraire, libérer l’entreprise d’une vision trop ambitieuse pour se concentrer sur l’essentiel : vendre des voitures.
Une chose est sûre : les prochains mois seront décisifs. Le Gravity SUV, la gestion de Winterhoff et la stratégie financière détermineront si Lucid peut tenir ses promesses ou si elle rejoindra la liste des start-ups prometteuses qui n’ont pas survécu.
Et vous, que pensez-vous de ce tournant ? Lucid Motors a-t-elle les épaules pour rivaliser avec les géants, ou ce départ annonce-t-il des jours plus sombres ? L’histoire reste à écrire.