
Le « fascisme digital » d’Instagram dénoncé par Erdogan
Les réseaux sociaux, ces plateformes incontournables de notre ère numérique, se retrouvent aujourd'hui au cœur d'une controverse geopolitique majeure. Le président turc Recep Tayyip Erdogan vient en effet de dénoncer avec virulence ce qu'il qualifie de "fascisme digital" de la part d'Instagram.
Erdogan accuse Instagram de "museler le peuple palestinien"
Selon le dirigeant turc, le populaire réseau social, propriété du groupe Meta (anciennement Facebook), se rendrait coupable de censure à l'encontre des Palestiniens. Ankara reproche notamment à Instagram d'avoir supprimé des messages de condoléances suite à l'assassinat d'Ismaïl Haniyeh, haut responsable du Hamas, dans une frappe attribuée à Israël.
Dans un discours prononcé lundi à Ankara, Erdogan a violemment fustigé ces pratiques :
"Nous sommes confrontés à un fascisme digital qui ne tolère même pas les photographies des martyrs palestiniens et les supprime immédiatement."
Recep Tayyip Erdogan, président de la Turquie
La Turquie bloque l'accès à Instagram
En réaction à ce qu'il considère comme une prise de position pro-israélienne, le gouvernement turc a décidé de bloquer l'accès à Instagram sur l'ensemble de son territoire. Une décision lourde de conséquences, alors que la Turquie compte plus de 57 millions d'utilisateurs de l'application, se classant ainsi au 5ème rang mondial.
Les autorités turques ont entamé des discussions avec les représentants de Meta pour tenter de trouver une issue à cette crise. Mais Ankara se montre pour l'instant inflexible, Erdogan accusant les entreprises technologiques occidentales de s'être "militarisées" en faveur d'Israël.
D'importantes pertes économiques
Au-delà des enjeux politiques, ce blocage d'Instagram fait peser un lourd tribut sur l'économie numérique turque. Selon l'organisme NetBlocks, chaque journée de suspension coûterait l'équivalent de 10,5 millions d'euros au pays. Un manque à gagner considérable pour de nombreux acteurs économiques qui ont fait du réseau social un canal incontournable de leur stratégie marketing et commerciale.
Jusqu'où ira la "guerre digitale" turco-israélienne ?
Cette affaire illustre une nouvelle fois la dimension géopolitique des grandes plateformes technologiques. Accusées par la Turquie de parti pris anti-palestinien, elles se retrouvent instrumentalisées dans le conflit qui déchire le Proche-Orient. Une situation inédite qui soulève de nombreuses questions :
- Les réseaux sociaux peuvent-ils rester neutres face à des situations de guerre ?
- Comment arbitrer entre liberté d'expression et risques de propagande guerrière ?
- Quel est le pouvoir réel des États pour réguler et sanctionner les géants du web ?
Autant d'interrogations cruciales à l'heure où le numérique est devenu un champ de bataille à part entière. Nul doute que l'affaire Instagram en Turquie, quelle que soit son issue, marquera un précédent dans cette nouvelle forme de conflit entre puissances.